L’argent à l’école.
Une école publique n’est pas un EPLE [1], elle ne dispose pas de la personnalité morale et juridique, elle ne dispose pas de son autonomie financière. L’école est laïque et gratuite.
Il n’y a pas d’argent dans l’école… circulez il n’y a rien à voir.
Pas d’argent pas de budget directement géré dans l’école, tout le fonctionnement de l’école repose sur la gestion du trésorier municipal et tout est théoriquement externalisé.
Pas d’argent dans l’école !
Et pourtant…. 50 000, 20 000 Euros voir beaucoup plus circulent dans toutes les écoles de manière courante.
J’ai beaucoup travaillé sur ce sujet lorsque j’étais à l’OCCE du Rhône, ces chiffres peuvent étonner, ils surprennent lesintéressés eux mêmes. « comment ? mais non nous n’avons pas autant d’argent »… J’ai souvent entendu cette réplique !
Les enseignants par définition n’ont pas de formation comptable, ils font donc une confusion entre la trésorerie qui se trouve à un instant T dans l’école et le total des sommes qui ont transité au cours de l’exercice. La mise en place d’un véritable comptabilité, le dégagement d’un compte de résultat et d’un bilan simplifié sont souvent une révélation pour les intéressés eux même.
Mais d’où vient cet argent ?
En principe pas du fonctionnement direct de l’école… encore que parfois on puisse observer des dérapages, comme on le verra plus tard
Est ce la conséquence des pratiques pédagogiques d’ un enseignement particulier, le financement de « lubies » propre à tel ou telle collègue ? Cela a pu être vrai en partie, du moins l’était-ce il y a encore quelques années.
Et bien non… Les flux d’argent dans l’école résultent désormais de pratiques institutionnelles. dans les années soixante le projet d’un adepte de la pédagogie Freinet constituait une exception qui tranchait dans le paysage de la pédagogie classique. Le projet est désormais inscrit dans le marbre des instructions officielles. or bien souvent les projets entraînent des volets financiers pour lesquels rien n’est prévu.
Le seul dispositif légal sera alors le recours à une structure associative, OCCE ou autre.
Dépourvus de toute formation les enseignants et au premier chef les directeurs d’école peuvent très vite se retrouver dans des positions délicates au regard de la loi. cette situation est aggravée par le flou et les erreurs qui peuvent être commis par la hiérarchie de l’éducation nationale et par les autres administrations
Durant les années où je travaillais à l’OCCE au quotidien sur ces sujets il m’a été donné d’ observer des situations pour le moins « intéressantes »..
Un premier exemple :
Une école maternelle rédige un projet d’école dont un des volets prévoit un travail basé sur le théâtre. dans le cadre de ce projet, les enfants préparent toute l’année un spectacle qui sera joué en fin d’année. Pour aider l’équipe enseignante, un acteur est recruté pour effectuer un travail de mise en scène. Ce vacataire est rémunéré pour ce travail.
premier point : le projet écrit, détaillant tous les aspects est dûment validé par l’inspection
deuxième point : la commune, en l’occurrence la ville de Lyon verse une subvention destinée à la rémunération de l’acteur sur le compte de la coopérativetroisième point : la directrice paye le « salaire » …
Le projet « roule »… oui mais…
La collègue directrice, en toute bonne foi, se trouve en position d’employeur au noir… Aucune démarche légale n’ayant été effectuée,l’URSAFF est en droit de requalifier le contrat, ou plutôt l’absence de contrat, en CDI… avec toutes les conséquences que cela peut avoir…
La collègue « tombait des nues » pensant être dans son bon droit, projet validé par l’administration, subvention allouée…
Heureusement dans ce cas la coopérative était affiliée à l’OCCE, nous avons régularisé la situation : procédéà la signature d’un CDD, effectué toutes les déclarations auprès des organismes sociaux, de la médecine du travail…
Découverte pour la collègue des « charges patronales…
Découverte du monde réel, du coût » exorbitant » des charges sociales … découverte de la position d’employeur… de la vraie vie… de l’entreprise …
Choc culturel … on devient un « salaud de patron »…
Le rapport des enseignants à l’argent est complexe. L’argent dans l’école gratuite est un sujet tabou l’argent corrompt, « c’est sale »… Alors quand il s’agit de gérer, tout devient complexe car au non dit, s’ajoute le vide sidéral institutionnel : pas de formation pas de conseils pas de temps pour accomplir cette tâche.
Tout naturellement c’est sur les directeurs qu’échoue cette charge.
La comptabilité de l’école va donc devoir s’appuyer sur une structure associative laquelle est très souvent de type coopérative OCCE.
De fait l’école se retrouve dotée de sa propre structure financière et comptable.
Mais le gestionnaire s’il est directeur ne l’est jamais « es qualité », ce n’est pas monsieur le directeur qui est responsable des comptes c’est » monsieur X « mandataire adulte de la coopérative OCCE ou monsieur le président de la structure associative rattachée à l’école ;
Concrètement tout se passe au coeur même l’école on plonge dans une totale schizophrénie…
Une fois la structure en place la collusion avec la structure légale est parfois évidente. Pour des raisons de simplification de gestion il est parfois tentant de transformer des subventions pour projet en subvention totale de fonctionnement.
J’ai tout vu dans ce domaine…
Cela commence avec la notion de subvention de « crédits libres » qui peut en fait couvrir de réelles subventions de fonctionnement, cela peut être un versement pour régler des factures de téléphone.
J’ai même vu le plus extraordinaire et qui montre encore une fois la confusion qui peut s’opérer au niveau de l’administration :
Des communes qui versent intégralement les crédits de fonctionnement pédagogique sur les comptes de la coopérative.
On plonge dans l’illégalité la plus totale, puisque le directeur qui gèrent ainsi son école se trouve placé en position de gestion de fait. [2]
Mais j’ai vu mieux encore si l’on peut dire :
Une commune du Beaujolais verse la subvention à la coopérative, ce versement est assorti d’une convention et … accrochez vous au bastingage cette convention est dûment visée par la préfecture du Rhône…
Comment voulez vous que les enseignants s’y retrouvent…
…
[1]Depuis la loi de décentralisation du 22 juillet 1983, les collèges et les lycées sont définis comme étant des établissements publics locaux d’enseignement (EPLE). Ils disposent donc, de par la loi, de la personnalité morale et d’une autonomie dans des domaines que le décret du 30 août 1985 précise. Le conseil d’administration (CA) de l’EPLE prend les décisions relevant de ces domaines d’autonomie et le chef d’établissement » en tant qu’organe exécutifde l’établissement exécute les délibérations du CA « . Cette situation est donc complètement différente, par exemple, de celle des écoles élémentaires où toutes les décisions sont prises au nom de l’État, le conseil d’école se contentant de donner un avis. Les lycées et collèges se trouvaient dans une situation analogue à celle des écoles aujourd’hui avant les lois de décentralisation du début des années 80
La gestion de fait s’applique, selon l’article 60-XI de la loi de finances n°63-156 du 23 Février 1963, à » toute personne qui, sans avoir la qualité de comptable public ou sans agir sous contrôle et pour le compte d’un comptable public, s’ingère dans le recouvrement de recettes affectées ou destinées à un organisme public… « , ou » reçoit ou maniedirectement ou indirectement des fonds ou valeurs extraits irrégulièrement de la caisse d’un organisme public »…1- La gestion de fait nécessite donc la réunion de deux conditions :
le gestionnaire de fait n’avait pas la qualité de comptable public ;
le gestionnaire de fait s’est ingéré dans le recouvrement des recettes, ou a reçu ou manié irrégulièrement des fonds publics,
2- La constitution d’une gestion de fait assimile le gestionnaire de fait à un comptable public ; il doit donc rendre compte de sa gestion dans les mêmes conditions qu’un comptable patent. Pour ce motif, le juge compétent pour déclarer la gestion de fait est le juge des comptes (Chambre Régionale des Comptes pour les collectivités locales).
La jurisprudence des Chambres Régionales des Comptes appliquée aux associations, en ce qui concerne la gestion de fait, applique les orientations suivantes :
il y a gestion de fait lorsque le versement d’une subvention à une association constituait un mandat fictif :l’objet réel de la subvention diffère de celui qui est annoncé, et vise à payer des dépenses irrégulières (indemnités au personnel, par exemple) ;
il y a gestion de fait lorsque l’association :
exerce en réalité la gestion déléguée d’un service public sans en avoir la qualité. Le Conseil d’Etat a admis que lescollectivités puissent déléguer la gestion de services publics, même administratifs. Mais il est indispensable, en ce cas, qu’une convention soit signée entre les parties.
En l’absence de convention, les Chambres Régionales des Comptes recherchent la qualification de service public de l’activité exercée par l’association.
Elles cherchent également à déterminer le degré de dépendance de l’association par rapport à la collectivité, parl’application de la méthode dite » du faisceau d’indices » : composition des instances dirigeantes de l’association, et pouvoir des élus au sein de ces instances, affectation de personnel communal à l’association, mise à disposition de locaux ou de matériel. S’il s’avère que l’association ne constitue qu’un simple démembrement de la collectivité locale, et ne dispose d’aucun pouvoir propre ou d’aucune initiative, et qu’elle gère néanmoins sans titre un équipement ou un service public, les Chambres Régionales des Comptes peuvent juger qu’il y a gestion de fait.
gère sans titre un équipement public pour le compte de la collectivité. La jurisprudence exige au minimum la signature d’une convention à cet effet. Si la gestion ne recouvre que l’administration générale du bien, à l’exclusion de la perception de recettes, la convention suffit. En revanche, lorsqu’il y a encaissement de deniers publics par l’association, il est nécessaire de créer une régie de recettes, afin de respecter les règles de la comptabilité publique réponse à la question écrite de M.Haenel, Sénateur, J.O. débat du Sénat, 23 Mars 1989, et réponse à la question écrite de M.Dumont, Député, J.O. débats Assemblée Nationale, 6 Mars 1989).
Dans cet esprit, les CRC ont considéré comme gestion de fait l’encaissement des recettes d’exploitation d’un parc de loisirs appartenant à une commune, par une S.E.M. n’ayant passé avec la commune qu’un simple bail commercial ; celui de recettes d’exploitation de stations de sports d’hiver communales par une association ; celui des loyers de gîtes ruraux par un G.I.E. ; celui de loyers d’abris de pêcheurs pur un office municipal privé ; celui de la location d’une salle polyvalente par une association culturelle, etc… (voir article de doctrine de MM. Jean-Louis CHARTIER et Alain DOYELLE, dans l’A.J.D.A. du 20 Mars 1990).
Lorsque l’association, sans gérer un service ou un équipement public, encaisse sans titre des recettes communales .
Ainsi, il peut y avoir gestion de fait lors de l’encaissement, par une association, de recettes provenant de manifestations organisées par la commune (CRC Corse, 14 Avril 1988 : recettes d’un festival réalisé par un office de tourisme municipal et conservées par un organisateur de spectacles), ou lorsque l’association n’a pasd’existence réelle (CRC, Alsace, 20 Janvier 1987, et CRC Champagne-Ardenne, 18 Février 1988 : comités des fêtes composés d’élus et dépourvus de personnalité juridique).
En résumé, 1a seule présidence par un élu d’une association de la loi de l901 ne constitue pas, à elle seule une gestion de fait, qui sanctionne plutôt l’absence de transparence des opérations, le démembrement effectif de la collectivité, ou la gestion déléguée occulte. (voir à ce propos la réponse à la question écrite de M. Maurice ARRECKX, publiée au J.0. des débats du Sénat, le 20 Décembre 1990).
3- La Procédure de déclaration de gestion de fait peut être mise en oeuvre, soit par le comptable patent de la collectivité, tenu de les signaler au juge des comptes pour dégager sa responsabilité propre, soit par le Préfet, soit par le procureur près la Cour des Comptes, soit par la Chambre Régionale des Comptes se saisissant elle-même. Un simple particulier peut saisir le juge des comptes, mais ce dernier n’a pas alors l’obligation de statuer.
4 – Les conséquences de la gestion de fait sont de trois ordres : le comptable de fait peut se voir infliger des amendes (article 9 de la loi n°54-1306 du 31 Décembre l954), il peut être mis en débat, et, en outre, sa qualité de comptable le rend inéligible au sens de l’article L. 231-6è du code électoral.
Représentativité
Le fonctionnement fédéral de l’OCCE pose le problème de la représentativité des associations départementales lors des assemblées générales et de la répartition des mandats pour les prises de décision et les votes qui engagentl’ensemble du mouvement.Deux modes de fonctionnement s’opposent : 1 AD, 1 voix, répartition du nombre de mandats au prorata du nombre d’adhérents.C’est ce deuxième mode de calcul qui est actuellement en vigueur.Ceci a pour conséquence de concentrer le pouvoir décisionnaires sur les « grosses » AD c’est à dire sur celles qui rassemblent le plus d’adhérents. Le représentativité d’une AD de 800 coopérateurs se réduit alors à une peaude chagrin face à celle qui en compte 160 000 …Pour autant est-il juste de mettre à égalité ces deux AD ? En effet adopter le principe d’une AD une voix, c’est perdre de vue que l’adhérent de l’OCCE, son essence même, sa raison d’être et d’exister c’est un individu : c’est le « petit coopérateur« . C’est faire de l’adhérent de l’OCCE un « machin » dématérialisé « l’AD » …Une grave confusion s’opère entre égalité et équité.Aucune de ces deux solutions ne me paraît satisfaisante et ne prend en compte les réalités d’un mouvement qui se veut coopératif…Au delà des clichés réducteurs il me semble qu’il est possible de mesurer autrement la représentativité d’une AD.J’affirme qu’une « grosse AD » n’est pas uniquement celle qui a le plus grand nombre d’adhérents. Adopter ce principe simpliste, c’est oublier de tenir compte de la démographie des départements.Un département qui compte une population scolaire de 20 000 élèves n’aura jamais plus de coopérateurs que celui qui qui en compte 140 000… c’est aussi bête que cela …Ainsi mesurer la représentativité d’une AD en se basant uniquement sur le simple facteur quantitatif du nombre de coopérateurs de l’AD est un non sens.Il me semble indispensable d’introduire un aspect qualitatif.Posant ce principe je sais très bien que je vais à contre courant d’idées et de principes qui ont cours dans l’éducation nationale… La notion de mérite est une notion vouée aux gémonies par bon nombre de courants bien pensant, syndicaux en particulier…Je le déclare tout de go, je suis viscéralement opposé à ce qui a pu être imposé dans l’éducation nationale et qui repose sur les seules critères d’ancienneté je classe » la loi du nombre » ainsi ainsi définie dans la même catégorie depensée.Je pense que le travail et les résultats d’une AD se mesurent avant tout à l’aune du travail de son équipe d’administrateurs.Je réfute d’avance l’argument qui est souvent opposé qui consiste à affirmer que seul le soutien bienveillant d’un Inspecteur d’académie est à même de donner du poids à une AD. Pas plus que le travail d’un « bon » animateur départemental n’est suffisant…Certes ce sont là des éléments importants mais qui ne peuvent se substituer au travail d’un CA dont les membresse mobilisent, s’investissent, chacun dans son domaine de compétences et qui conduit à la vitalité et aurayonnement de l’AD.Or cette action cette « vitalité » se traduit également par un nombre croissant d’adhérents.Mais ce nombre doit être observé et mesuré par rapport au nombre d’adhérents potentiels du département.Par conséquent il n’est que de faire un ratio très simple entre le nombre de coopérateurs et le nombre de population scolaire du département pour mesurer le « poids relatif » d’un AD qu’il convient alors de prendre en considération au moment de prendre des décisions collectives.Si l’on fait ce calcul, très simple, on constate alors que les « grosses » AD ne sont plus celles que l’on croyait.Pourquoi donner toutes les clefs à un « »mastodonte de 140 000 qui vit sur son erre et qui dispose de moyens conséquents alors qu’une AD plus modeste avec un CA qui « mouille la chemise » aura plus fait proportionnellement pour la représentativité du mouvement ?
Pour moi la coopération ne peut se fonder ni sur la loi des grands nombres ni sur la dématérialisation du coopérateur…